Pionnier de la photographie couleur du milieu du XXème siècle, Fred Herzog (1930-2019) excella dans l’usage du film Kodachrome.
L’ouvrage Fred Herzog. Modern Color explore ses talents de coloriste et de photographe de rue fasciné par les détails étranges de Vancouver. Ses photographies sont des aperçus perspicaces de la nature humaine — ressemblant quelquefois plus à des peintures d’Edward Hopper qu’à des images documentaires.
Ses “portraits de ville” comme l’appelle David Campany, est une sorte de poésie vivante.
Les innombrables enseignes et panneaux d’affichage — qui à un œil inexpérimenté auraient paru chaotiques — semblent s’organiser de manière cohérente dans des cadres intelligents. Et il utilise la couleur, non pas pour rendre joli ce qu’il capture, mais pour transmettre le pur plaisir de ce qu’il envisage. Cette insistance à mettre en valeur les couleurs telles qu’il les voit, a empêché son travail de recevoir une large reconnaissance, pendant plus de cinq décennies. Andy Sylvester, de Equinox Gallery, commente ainsi : “Pensez à un écrivain que personne n’a publié pendant 54 ans. Je veux dire, tu arrêterais, non ?”
Herzog répond aux questions concernant son ascension tardive vers la gloire avec un léger étonnement. “Je pense que j’aurais eu une vie moins intéressante si le succès était venu plus tôt. Pour certains, ses photographies évoquent un sentiment de nostalgie des “temps plus simples”. Mais en les regardant, on se demande si les temps n’ont jamais été simples.
• En regardant les photographies du vieux Vancouver prises par Herzog, il est surprenant d’apprendre qu’il n’est devenu connu qu’après une grande rétrospective tenue en 2007. Né en 1930, Fred Herzog grandi à Stuttgart, en Allemagne, avant d’émigrer au Canada en 1952. Il utilise son premier rouleau de pellicule Kodachrome l’année suivante.
Pendant les décennies suivantes, il documente les rues de sa ville d’adoption, Vancouver, avec ses panneaux publicitaires animés le jour et ses néons lumineux la nuit. Divers, fougueux et peu recommandable ; il a tout enregistré avec une franchise désinvolte, un mélange d’affection et de curiosité.
Ce qui est remarquable dans le travail de Fred Herzog, c’est la façon dont il a reconnu la valeur artistique de la couleur, à une époque où le noir et blanc était salué comme la seule forme de toute photographie sérieuse.
Son utilisation cohérente et magistrale du médium est antérieure à l’exposition de William Eggleston en 1976 au Museum of Modern Art de New York. De plus, Eggleston lui-même n’a commencé à faire des images en couleur qu’en 1965.
Parmi les pionniers du médium en Amérique du Nord, Saul Leiter est peut-être le seul à s’intéresser à la forme avant Herzog. Fait intéressant, le photographe canadien n’était pas familier avec le travail couleur de Leiter, jusqu’en 2011.
• Les 230 images de l’ouvrage Fred Herzog, Modern Color couvrent un large éventail de sujets, mais la vision d’Herzog est apparente dans toutes. Son amour pour la couleur, pour les formes et les lignes se démarque ; qu’il s’agisse d’une scène de rue animée ou d’un terrain vide. Herzog s’avère être un photographe couleur “pivot”, même si son travail est encore peu médiatisé.
Modern Color témoigne de la flexibilité de la photographie de rue en tant que beaux-arts. Et un hommage à une ville disparue enracinée, dans une époque qui n’existe plus.
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